Serena - Ron Rash
En Caroline du Nord, dans les années trente, George Pemberton est exploitant forestier. A l’occasion d’un séjour à Boston, il rencontre et épouse la belle et ambitieuse Serena. Dès lors, le couple poussé par le désir de s’enrichir, n’a qu’une idée en tête : déboiser, déboiser, déboiser. C’est compter sans le projet de quelques amoureux de la nature qui ont décidé de créer un Parc National pour protéger ce qui peut encore l’être. Mais rien ne saurait résister à la cruelle et impitoyable Serena.
Ce roman de Ron Rash est bien différent du précédent, même si le décor est le même. On n’y retrouve pas cette atmosphère oppressante de fin du monde, et pourtant une menace plane, tant sur les hommes que sur les arbres.
Le personnage de Serena est un peu exagéré : une femme d’acier portée par son avidité, qui n’a de place ni pour la tendresse, ni pour l’amour (que ce soit celui des humains, ou celui de la nature). Mais le roman s’ouvre sur une scène de froide violence et le lecteur comprend très vite que cette femme ne se laissera arrêter par rien. Et de fait, les cadavres ne vont pas tarder à s’accumuler car la dame ne supporte pas la moindre opposition.
L’intérêt de ce roman réside selon moi dans la multiplicité des points de vue. D’un côté ce couple de prédateurs qui ne voient dans la forêt qu’un tas de billets verts, de l’autre la jeune Rachel qui essaie tant bien que mal d’élever seule le petit garçon qu’elle a eu de Pemberton avant son mariage. Mais aussi un groupe de bucherons qui travaillent dur, sur fond de crise sociale et de peur du chômage, et qui observent d’un œil critique mais prudent, leur couple de patrons qui ne laisse derrière lui que ruine et désolation.
C’est le roman d’une Amérique sauvage et sans loi, qui se construit sur des cadavres. Un roman très moderne, finalement.
Traduit de l’américain par Béatrice Vierne.
Le Masque, 2011. – 404 p.