L'amour est aveugle. Le ravissement de Brodie Moncur - William Boyd

Publié le par Papillon

"L'amour ? Qu'est-ce donc que l'amour ? Ça se mange ? Ça se boit ? Ça sert à quelque chose ?"
 
Parce qu'il est doté d'une oreille absolue (et d'une marraine bienveillante), Brodie Moncur va pouvoir échapper au presbytère familial et au triste destin auquel le condamnait le tyrannique et alcoolique pasteur qui lui sert de père. En 1894, il a vingt-quatre ans et travaille comme accordeur de piano chez Channon & Co, un respectable fabriquant de pianos. Parce qu'il parle français, son patron, conscient de ses qualités et de son inventivité, décide de l'envoyer à Paris contribuer au développement de la succursale française. Mais à Paris, Brodie va être frappé d'une double malédiction : il tombe éperdument amoureux et attrape la tuberculose ; deux maladies chroniques à développement aléatoire et traitement incertain, l'une devenant la métaphore de l'autre. L'objet de sa passion, Lika Blum, est une très belle cantatrice russe, qui se trouve être la maîtresse de John Kilbarron, client de Brodie et pianiste virtuose, qualifié par la critique de l'époque de "Liszt irlandais". Pour les yeux de sa belle, Brodie va se trouver entraîné dans des aventures musicales et amoureuses aux quatre coins de l'Europe.
 
William Boyd a un sens aigu du romanesque, et nous offre un roman virevoltant qui interroge les mystères de l'amour, ce sentiment intense et illogique, qui nous pousse aux pire folies... Avec Brodie Moncur, le lecteur est entraîné dans les arcanes de la musique classique et dans les plus belles villes européennes. On sent que l'auteur prend beaucoup de plaisir à nous balader dans les rues de Paris, Trieste ou St-Petersbourg au tournant du siècle, autant qu'à nous livrer tous les secrets d'un piano ou d'une mélodie sensible. Et on rencontre peu de personnages aussi attachants que ce Brodie Moncur avec ses lunettes de grand myope, son amour fou et sa connaissance affutée du piano. Contrepoint lumineux au sombre Kilbarron, ce jeune homme, bien que dépourvu de toute naïveté, se fait toujours un peu avoir. Le lecteur, d'ailleurs, devine bien avant lui ce qu'il refuse de voir... Même si le roman s’essouffle un peu dans la dernière partie, comme si l'auteur ne savait plus trop quoi faire de son héros, j'ai pris un plaisir fou avec cette histoire qui fait voyager, et lance de multiples clins d’œil aux grands romans d'aventures du XIXe siècle.
 
(Ne surtout pas lire la quatrième de couverture qui révèle l'essentiel de l'intrigue)
 
C'est Nicole qui m'a donné envie.
 
Traduit de l'anglais (Grande-Bretagne) par Isabelle Perrin.
Seuil, coll. Cadre Vert, 2019. - 480 p.
 
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A
Je n'ai pas lu William Boyd depuis une éternité et pourtant c'est un écrivain que j'apprécie beaucoup. Merci à Kathel pour l'info poche. Elle tombe à point.
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P
Pareil pour moi, je l'avais un peu négligé ces derniers temps, alors qu'il m'a rarement déçue.
K
En plus, il sort en poche pour cette rentrée ! A noter, donc !
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P
Ah oui ! En effet :-)
N
Oh je suis bien contente que tu aies fait et apprécié le voyage avec Brodie :-) Ce n'est pas mon Boyd préféré mais il vaut très largement le détour.
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P
Moi non plus, ce n'est pas mon préféré de Boyd, mais il reste un formidable romancier !