Je refuse - Per Pettersen
"Le temps était-il un sac dans lequel on pouvait enfouir tout ce qu'on voulait ? Et s'il décrivait un mouvement circulaire au lieu de parcourir une ligne droite, nous ramenant sans cesse à notre point de départ ?"
Quand ils se croisent par hasard sur un pont en ce petit matin d'automne, Jim et Tommy ne se sont pas vus depuis plus de trente ans, alors qu'ils ont été autrefois les meilleurs amis du monde. Ils ne le savent pas encore, mais ils vont vivre la pire journée de leur vie.
Jim et Tommy grandissent dans le même hameau en grande banlieue d'Oslo, dans deux familles très différentes, et sont inséparables depuis toujours. Jim est le fils unique d'une mère célibataire et chrétienne. Tommy est l'aîné d'une fratrie de quatre, fils d'une mère abandonnante et d'un père violent. La violence du père finit par faire éclater la famille. Les enfants sont dispersés dans plusieurs foyers. Tommy atterrit chez Jonssen, un vieux garçon sympa, qui l'embauche très vite dans la scierie locale, alors que sa sœur Siri et Jim continuent à fréquenter le lycée. Trente ans plus tard, Tommy est devenu un homme riche, alors que Jim est en arrêt maladie depuis des mois. Ni l'un ni l'autre ne sont très heureux.
Plusieurs voix et plusieurs époques se croisent, des années 60 aux années 2000, permettant peu à peu au lecteur de démêler le passé des deux amis, celui de leurs familles et la cassure qui les a séparés. Sauf que tout ça m'a paru bien banal, déjà vu, très lent. La description minutieuse de chaque trajet en voiture, par exemple, m'a fait souvent soupirer d'ennui. L'émotion a fini par surgir aux alentours de la page 160 avec le départ de cette mère qui abandonne ses enfants, et sa vie avec eux. J'ai eu le sentiment que c'était là que le roman démarrait et c'est à partir de là que je me suis laissée embarquer. On découvre peu après la faille dans l'amitié de ces deux garçons, la faille chez Jim surtout, et on comprend comment leur amitié était si intense, si fusionnelle que tout espoir de bonheur leur était interdite après la rupture, comme si chacun d'eux s'était amputé de la moitié de lui-même.
La fin très émouvante sauve tout juste ce roman qui souffre selon moi d'un défaut de construction : une narration trop morcelée, des longueurs, des redondances. Dommage.
Du même auteur : Pas facile de voler des chevaux
Ils m'avaient donné envie : Jérôme, Aifelle
Traduit du norvégien par Terje Sinding.
Gallimard, coll. Du monde entier, 2014. - 270 p.