Rengaine - Rachid Djaïdani
Dorcy et Sabrina ont décidé de se marier.
Ils sont jeunes, ils s'aiment, la vie est belle.
Sauf que non.
Parce que Dorcy est noir et chrétien, et Sabrina arabe et musulmane. Et elle a quarante frères qui vont s'opposer à ca mariage, surtout Slimane, l'aîné.
Donc, pendant que Dorcy, apprenti comédien, court les castings farfelus, Slimane essaie de lui mettre la main dessus, tout en convoquant la fatrie au grand complet.
Vous lirez partout que ce film est un ovni et je confirme : ce film est un ovni. Sans budget et sans autorisation, le réalisateur a mis neuf ans à le finir. Ce qui explique peut-être pourquoi ce film a l'air d'un film amateur : gros plans trop serrés, cadrages approximatifs, images flous et sautillantes. Du coup, j'ai eu beaucoup de mal à entrer dans cette histoire, pourtant tournée dans mon quatier, le Nord-Est parisien, avec son métro aérien, son canal et son parc des Buttes-Chaumont. Et puis, il y a ces dialogues qui déstabilisent le spectateur, en claquant comme des balles de revolver, pleins de colère et de violence. Car, dans cette histoire, tout le monde veut donner son avis, et avec brutalité, souvent : la famille, bien sûr, mais aussi les amis, les voisins, les connaissances, et tout le monde a l'air d'accord. Ce mariage ne peut se faire...
Et voilà qu'à mi-parcours, le film trouve soudain son rythme. Slimane prend une nouvelle épaisseur. A défaut de l'aimer, on peut au moins le comprendre, lui le grand frère qui se sent investi d'une mission de protection de la famille, et qui s'accroche de toutes ses forces à une tradition qui prend l'eau de toute part. Slimane, qui cache ses amours à sa famille, a des raisons de douter. Et il doute, se fait secouer lui aussi, dans ses certitudes, par les fantômes qui sortent du placard...
Rachid Djaïdani met le doigt là où ça fait mal : sur les haines entre communautés, sur la peur de la différence, du mélange, de l'autre. A l'heure où l'on débat du "mariage pour tous", on constate qu'il y a encore des batailles à mener, et qu'elles ne se régleront pas au parlement.
Film français (2012) de Rachid Djaïdani,
avec Sabrina Hamida, Slimane Dazi, Stéphane Soo Mongo.
Durée : 1h15.