Remonter la Marne - Jean-Paul Kauffmann
Jean-Paul Kauffmann, journaliste, écrivain et amateur de cigares, entreprend de remonter la Marne, en suivant ses berges, à pied et en solitaire. Pourquoi la Marne ? Parce que, selon Kauffmann, c'est une rivière injustement traitée et mésestimée. Plus longue et plus large que la Seine, elle aurait dû traverser Paris et aller se jeter dans la mer au Havre, mais elle s'est fait voler la vedette par les géographes. La Marne est aussi le dernier rempart qui protège la capitale en cas d'invasion, comme l'Histoire l'a montré à plusieurs reprises. Enfin la Marne mène dans l'Est, une région qui n'est ni la plus touristique ni la plus médiatique de France, mais qui n'en possède pas moins son charme propre. Sans compter que Kauffmann est un grand amateur de Champagne, un vin "qui doit tout à la Marne."
Par une belle après-midi de septembre, l'auteur se met donc en route, sac sur le dos et cigares dans la poche, à Charenton, lieu de confluence de la Marne avec la Seine. Commence alors une longue et quelque peu fastidieuse traversée de la banlieue parisienne, où la Marne n'en finit plus d'étaler ses méandres dont les rives sont trop souvent transformées en terrains vagues, abandonnées et désertiques, surmontées de ponts autoroutiers et bordées de murs couverts de tags. Il faut attendre Lagny-sur-Marne pour que la campagne commence à reprendre ses droits et que le marcheur plonge à la fois dans la géographie et dans l'histoire de France.
Et l'Histoire, ça le passionne, Kauffmann, du siècle des Lumières à la guerre de quarante, en passant par l'arrestation de Louis XVI ou les guerres napoléoniennes, chaque lieu lui évoque un évènement historique. Et la littérature n'est pas en reste : Bossuet à Meaux, Lafontaine à Château-Thierry ou André Breton à Saint-Dizier, sans oublier Ponge, Bachelard, Radiguet, et bien d'autres. Mais Kauffmann ne perd jamais de vue l'objet de son voyage : la rivière, odeurs et couleurs, lumière et mouvement.
"Féerie de la rivière sauvage, nerveuse, absolument insensible au milieu qui l'entoure. Quelque chose de primitif, une force autonome lancée par l'impulsion d'un courant."
A travers paysages, rencontres et dégustations, il nous offre une promenade sensuelle, érudite et enchanteresse dans la France profonde.
Fayard, 2013. - 263 p.