Jane Eyre - Charlotte Brontë
Il y a quelques jours, j'ai vu Jane Eyre au cinéma. Joli film, dont je suis quand même sortie très frustrée... Parce que, malgré le charme infini de Michael Fassbender (trop jeune et trop beau pour le rôle de Mr Rochester), je n'ai pas réussi à croire à cette histoire d'amour. La jeune Mia Wasikowska, qui incarne Jane Eyre, est si glaciale que l'on a du mal à croire qu'elle puisse brûler de passion. Car c'est bien de passion qu'il s'agit dans cette histoire... Mais ce film a une qualité : il m'a donné furieusement envie de relire le roman, ce qui n'est déjà pas si mal. Et, grâce à un opportun jour de pluie, c'est désomais chose faite.
Petit rappel pour les incultes : Jane Eyre, chef d'oeuvre de Charlotte Brontë, a été publié en 1847. Son héroîne est une jeune fille pauvre et orpheline, élevée par une tante qui la déteste et va bien vite l'expédier dans une pension sinistre et insalubre, que ne renierait pas Charles Dickens. Elle en sort dix ans plus tard, pour devenir gouvernante à Thornfield Hall, sombre manoir perdu dans la lande anglaise. Alors qu'elle se demande si elle n'a pas fait une erreur en acceptant ce poste, et si elle n'est pas en train de passer à côté de sa vie, le maître des lieux fait une apparition tonitruante. Mr Rochester, personnage sombre et taciturne, ne va pas tarder à faire palpiter le coeur de la jeune fille, alors que Thornfield Hall est le théâtre d'évènements étranges...
Bien sûr je n'avais plus, avec cette relecture, le plaisir de la surprise et il n'y avait guère de mystère quant au dénouement... Et pourtant. Pourtant, la puissance et le charme de la plume de Charlotte Brontë sont tels que j'ai été complètement emportée par l'atmosphère inquiètante de ce roman, et par l'attraction irrésistible qui va bientôt réunir les deux héros.
Tout les oppose : il est riche et puissant, elle est pauvre et sans appui. Et pourtant, ils sont semblables. Lui, est un homme mûr (et pas très beau) qui sait qu'il a raté sa vie et cache une secrète souffrance sous le masque du cynisme et de la mauvaise humeur. Elle, est une jeune fille sensible (et pas très belle) qui a appris à se protéger des vicissitudes de la vie en s'armant de défiance et de réserve. Son âme d'artiste va lui permettre de deviner la vraie nature de son maître. Quant à lui, il est séduit par sa pureté et sa franchise. Il va même, avec une certaine cruauté, jouer avec ses sentiments, comme un chat avec une souris, pour la pousser dans ses retranchements. C'est magnifique, la complicité qui se tisse entre ces deux êtres dont on comprend bientôt qu'ils sont faits l'un pour l'autre...
Mais nous sommes dans l'univers des soeurs Brontë : il y aura des obstacles, des retournements de situation, des drames, des coups de théâtre, et même un doigt de fantastique... Bref, de quoi tenir le lecteur en haleine pendant plusieurs centaines de pages.
Merveilleux roman, qui m'a donné tout ce qui m'avait manqué à l'écran : du romantisme, de la passion, et des frissons.
Traduit de l'anglais par Charlotte Maurat.
Le Livre de poche, 1991. - 668 p.