American tabloïd - James Ellroy
Le propos de James Ellroy, dans ce roman est de détruire le mythe Kennedy : « Jack Kennedy a été l’homme de paille mythologique d’une tranche de notre histoire particulièrement juteuse (…) . Jack s’est fait dessouder au moment propice pour lui assurer sa sainteté. Les mensonges continuent à tourbillonner autour de sa flamme éternelle. L’heure est venue de déloger son urne funéraire de son piédestal et de jeter la lumière sur quelques hommes qui ont accompagné son ascension et facilité sa chute. » Pourtant cet ouvrage n’est ni un roman historique ni un livre politique, car Ellroy prend le parti de montrer le rôle qu’a joué la Mafia pendant la présidence de Kennedy.
L’histoire commence en novembre 1958. Jack Kennedy est sénateur du Massachussetts et s’apprête à annoncer sa candidature à la Présidence, son frère Bobby dirige le Comité McClellan, chargé d’enquêter sur les activités de la Mafia. Ces deux hommes ont un ennemi mortel : Edgar J. Hoover, patron du FBI. Pour Hoover, la Mafia n’existe pas et le seul danger pour l’Amérique, ce sont les communistes. Convaincu que Kennedy risque de devenir le prochain président et désireux de connaître les agissements des deux frères, Hoover fait infiltrer le Comité McClellan par l’un de ses hommes. Quelques semaines plus tard, Fidel Castro prend le pouvoir à Cuba et instaure sur l’île un régime communiste. Catastrophe pour les américains. Catastrophe pour le FBI, catastrophe pour la CIA. Et pour la Mafia dont les nombreux casinos cubains ont été nationalisés par Castro. Malgré sa haine de Bobby Kennedy, la Mafia décide de financer la campagne de son frère, persuadée que Jack Kennedy saura chasser Castro de Cuba. L’histoire est racontée au travers de trois hommes : deux flics et un truand. Mais pour Ellroy la frontière entre flic et voyou est mince et perméable, comme le montrera la suite. Ces trois hommes vont travailler successivement pour le FBI, la CIA, les Kennedy et la Mafia. Ils vont s’allier, se trahir et se combattre.
Il est difficile d’entrer dans ce roman. Toute la première partie manque de structure narrative. Les chapitres se suivent comme autant de courtes histoires de gangsters : extorsions, chantage, meurtres. Le point de vue change à chaque chapitre et l’action s’éparpille entre de multiples personnages secondaires. Le lecteur est souvent un peu perdu dans le jeu des alliances tordues et fluctuantes entre toutes les forces en présence. Difficile aussi de trouver sympathique le moindre personnage, car ils sont presque tous animés par la soif d’argent, de pouvoir ou de vengeance. Ellroy semble prendre un plaisir particulier à dépeindre des scènes très sanglantes qui n’apportent rien à l’histoire. Son style est également très particulier : phrases courtes, langage argotique truffé de néologismes.
Ce livre conviendra à ceux qui aiment les histoires de gangsters et décevra ceux qui veulent connaître un peu mieux l’histoire de l’Amérique, car finalement Kennedy joue un rôle très secondaire dans cette histoire.
Edition Rivages Noir - 2003 - 780 p.