Ce livre raconte l’histoire d’un homme extraordinaire, non qu’il fut un héros ou un grand artiste, puisque l’histoire n’a gardé une légère trace de son nom que parce qu’il fut un grand collectionneur de musique et que grâce à lui nous sont parvenues beaucoup de partitions de le Renaissance de tous les pays d’Europe. Cet homme, Francis Tregian, a vécu à une époque à la fois riche de devenir et difficile dans son présent : la Renaissance, traversée par les guerres entre catholiques et protestants qui déchirent tous les pays d’Europe.
Il naît en 1574 dans une des plus nobles familles de Cornouaille. Mais malheureusement pour lui son père est catholique à un moment où la reine protestante d’Angleterre, Elisabeth, vient d’être excommuniée par le pape et a exhorté tous les nobles du pays à abjurer la religion catholique. Francis Tregian père a refusé et a donc été emprisonné sur-le-champs avec confiscation immédiate de tous ses biens. Le petit Francis est obligé de fuir avec sa mère et ses frère et sœur. C’est le début d’un long exil qui durera toute sa vie, l’entraînant de Londres à Reims, de Rome à Amsterdam.
La famille s’exile donc à Londres, où elle vit dans une semi-clandestinité. Le père de Francis Tregian passera la plus grande partie de sa vie en prison et deviendra pour tous les catholiques une sorte de héros de la résistance. Pendant ce temps Francis reçoit une éducation parfaitement humaniste : latin, musique, escrime.
Mais la grande passion de sa vie est très vite la musique. S’il est un compositeur médiocre, il joue à la perfection de l’orgue et du virginal (instrument à clavier, ancêtre du piano). Après Londres il poursuit son éducation à Reims puis devient secrétaire d’un prélat à Rome avant d’épouser une bordelaise et de devenir marchand de soie à Amsterdam. Il sera pendant un temps soldat et espion, Entre temps il aura rencontré les figures les plus marquantes de son temps : de Henri IV à Elisabeth 1e, de Monteverdi à Shakespeare. Mais ce qui caractérise cet homme c’est la modernité de sa vie : il est à la croisée de plusieurs mondes : catholique ami des protestant, gentilhomme pratiquant la musique et l’épée, connaissant plusieurs langues, ayant vécu dans plusieurs pays d’Europe : il est la figure même de l’humaniste de la renaissance, un homme de culture et de tolérance.
Ca se lit comme un roman d’aventures, ça se dévore tant on s’attache à la personnalité de cet homme sensible qui connaîtra un tas de drames autour de lui, dans cette Europe déchiré (peste, guerre, prison, fuite) pour finir tranquillement sa vie dans la campagne suisse à fabriquer des instruments de musique.
Denoël, 1995 – 604 p.