Elégie pour un américain - Siri Hustvedt
Après les obsèques de leur père dans le Minnesota, Erik et Inga rentrent à New-York. Erik Davidsen, psychiatre divorcé, se plonge dans les papiers de son père, explore ses Mémoires et découvre une lettre qui évoque une mort mystérieuse. Quant à sa sœur Inga, elle essaie de surmonter un autre deuil, celui de son mari Max, Blaustein écrivain très célèbre qui laisse une œuvre immense et quelques secrets…
Avant d’être un livre sur le deuil, ce roman explore la mémoire sous toutes ses formes : individuelle, familiale et nationale. Ce n’est pas un hasard si le narrateur Erik, pratique la psychanalyse, puisque son travail consiste justement à aider ses patients à interroger leur mémoire pour résoudre leurs névroses. A travers les Mémoires de son père il explore l’histoire familiale et retrouve ses souvenirs d’enfant. Il retrace aussi une certaine histoire de l’Amérique, à travers ces immigrants venus d’Europe qui ont défriché la prairie pour y construire leurs fermes puis ont vécu le naufrage du rêve américain lors de la crise de 1929.
C’est un roman intimiste qui tourne autour de l’histoire d’une famille mais il est complètement ancré dans la réalité puisqu’on y évoque autant le traumatisme du 11 septembre 2001 que la guerre en Irak. Autour d’Erik, personnage solitaire, et d’Inga, hypersensible, gravitent d’autres personnages et d’autres histoires. On y croise des intellectuels, des artistes qui tous s’interrogent sur la réalité du monde. On retrouve avec plaisir Léo, le héros de Tout ce que j’aimais, de même que l’on retrouve tous les thèmes chers à Siri Hustvedt : le rôle de l’art pour décoder le monde, la fragile limite entre folie et normalité, les emboîtements des histoires des uns dans les histoires des autres. Et on ne peut s’empêcher de penser que derrière le personnage de Max Blaustein se cache Paul Auster…
C’est un roman très riche, à l’écriture fluide et sensible, dans lequel on s’installe comme dans un bon fauteuil moelleux que l’on ne voudrait jamais quitter.
D’autres avis : Dominique – Alice
Traduit de l’américain par Christine Le Boeuf.
Actes Sud, 2008. – 394 p.