Le livre des reines - Joumana Haddad
"Dans ses veines coulait le sang épais de l'insoumission, de même qu'une liqueur addictive nommée douleur."
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"Au fond de mon âme il est un tombeau si attirant que je ne sais jusqu'à quand je résisterai à son appel."
Ce roman, très inspiré de l'histoire familiale de l'autrice, nous faite traverser un siècle d'histoire du Proche-Orient, tout en offrant un point de vue féminin sur la guerre. C'est l'histoire d'une errance pour fuir la violence, et on y assiste à toutes les horreurs que les femmes peuvent subir en temps de guerre comme en temps de paix, depuis le mariage forcé jusqu'à l'esclavage sexuel, en passant par toutes les formes d'agressions, les tabous et les interdits. Mais ces quatre femmes se bâtissent quand même un destin. Malgré les ruines et les deuils, elles se relèvent toujours, pour aimer, vivre et lutter. Elles tirent précisément leur force de leur histoire familiale, symbolisée par un médaillon que l'on se transmet de mère en fille. J'ai beaucoup aimé les nombreux termes étrangers qui parsèment le texte et permettent au lecteur (grâce aux notes de bas de pages) d'entrer dans le patchwork de cultures et de langues qui composent le Proche-Orient. L'histoire alterne des passages purement narratifs avec des extraits des journaux intimes de chacune de ces femmes, qui nous permettent d'entrer littéralement dans leurs têtes, et de partager leurs désirs, leurs peurs, leurs rêves et leurs angoisses. L'autrice a préféré le récit intimiste et féministe au récit historique, et c'est un peu frustrant parfois. J'ai regretté que cette histoire si dense et si poétiquement écrite soit si brève, je serais bien restée en compagnie de certaines de ces femmes, notamment la flamboyante et fière Qadar, et j'aurais aimé en apprendre un peu plus sur les méandres d'une Histoire que je connais assez peu, finalement.
"Il y a tant de corps épars derrière moi, enterrés ou abandonnés, dans tant de lieux différents, que je ne peux même plus en conserver la trace. Le monde n'est qu'un gigantesque cimetière."
Traduit de l’anglais par Arnaud Bihel.
Jacqueline Chambon, 2019. - 272 p.
Lu dans le cadre du Mois libanais chez Maeve .
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