La Symphonie du hasard, livre I - Douglas Kennedy

Publié le par Papillon

"Nous ne sommes pas seulement la somme de tout ce qui nous est arrivé au cours de notre vie, mais aussi un témoignage vivant de la façon dont on a interprété ces évènements."
 

 

Sans le billet enthousiaste de Nicole (et le fait que ce livre était disponible dans ma bibliothèque préférée), je ne sais pas trop si j'aurais renoué avec Douglas Kennedy, dont je m'étais lassée depuis un moment avec l'impression qu'il n'en finissait plus d'écrire toujours le même livre (je crois que tous les écrivains écrivent toujours le même livre, sauf que certains le font avec plus de subtilité que d'autres). 

La Symphonie du hasard nous transporte dans le New York des années 80 à la veille de l'élection de Reagan, où nous faisons connaissance avec Alice Burns, éditrice trentenaire qui va rendre visite en prison à son frère. Adam, en froid avec tout le reste de la famille, lui révèle un secret de jeunesse, datant de l'époque où il était un jeune espoir du hockey sur glace. Ces confidences renvoient Alice à sa propre jeunesse, le temps du lycée puis de l'université. Et nous voici replongés dans les années 70 où finissait de s'éteindre l'esprit "peace and love" des folles années 60. Alice, brillante élève littéraire vaguement hippie, n'est pas très heureuse dans sa pourtant peu conformiste famille, entre un père catholique irlandais un brin psychorigide et une mère juive new yorkaise toujours en train d'engueuler quelqu'un, tous deux soufflant tour à tour le chaud et le froid sur leurs enfants. Entre son frère aîné Peter, doué et rebelle, et son frère cadet Adam, timide et soumis, Alice cherche sa place, et a hâte d'intégrer une université qui l'éloignera de cette famille qui l'insupporte et où la communication est pour le moins compliquée et les secrets abondants.
 
"Si les deux dernières décennies m'ont appris quoi que ce soit, c'est une vérité essentielle : le malheur est un choix."
 
J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce roman qui est particulièrement platement écrit et où les relations dans cette famille de cinglés (c'est Alice qui le dit) me semblaient sonner complètement faux. Le roman atteint son rythme de croisière quand Alice arrive à l'université de Bowdoin dans le Maine. Elle s'y fait de nouveaux amis, tombe amoureuse, intègre le comité éditorial du journal universitaire, et se laisse éblouir par son professeur d'histoire. Tout cela est somme toute assez banal, mais offre l'occasion à l'auteur de mettre en avant toutes les difficultés auxquelles étaient confrontés les jeunes dans le système éducatif américain des années 70 (j'ose espérer que les choses ont changé). Il y a d'un côté l'obligation de complaire aux désirs des parents sans toujours pouvoir choisir sa voie, il y a ensuite le parcours du combattant pour intégrer la plus prestigieuse des universités (leur sélection est aussi féroce que leur coût est prohibitif), il y a surtout la difficulté d'être soi et de trouver sa place dans un contexte où toute différence est montrée du doigt, moquée, stigmatisée (homophobie, antisémitisme, sexisme), il y a enfin la pression constante sur les résultats. Ce qui explique peut-être l'étonnante consommation de drogues et d'alcool à laquelle on assiste sur la campus. Rien d'étonnant, donc, à ce que le parcours universitaire d'Alice soit marqué par une série de drames : disparition, suicide, agression, qui finiront par la pousser à prendre la fuite.
 
"On pense souvent que notre nation soutient l'individualisme acharné, mais, en réalité, la plupart d'entre nous lui préfèrent la tranquillité du conformisme."
 
En arrière-plan, Douglas Kennedy évoque le contexte historique (de la réélection de Nixon aux États-Unis à la chute d'Allende au Chili), et on discerne bien le projet de cette trilogie de raconter sans fard une Amérique qui se veut égalitaire mais se fracasse sur ses préjugés. Mais tout m'a semblé artificiel dans cette histoire, une suite d'anecdotes un peu convenues, où même l'abondance de références littéraires tombe dans l'affectation. Il est probable que si ce roman n'était pas arrivé dans ma vie après le brillantissime 4321 de Paul Auster, je l'aurais davantage apprécié, mais je confesse que je l'ai trouvé excessivement plat. Je ne suis pas sûre que mon intérêt pour Alice soit suffisant pour que je me jette sur le deuxième épisode de la trilogie qui sortira en mars.
 
The Great wide open, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Chloé Royer.
Belfond, 2017. - 362 p.
 
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Commenter cet article
L
ce n'est donc pas ce roman qui me fera lire cet auteur qui n'arrive jamais à me tenter malgré son succès en librairie
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K
Du coup, je retiens qu'il faut que je lise le dernier Auster, qui est dans ma pile. Et peut-être celui-là, mais bien plus tard!
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P
Ah oui alors, sans aucune hésitation !
S
Je suis d'accord avec le commentaire de Laure. <br /> Je l'ai lu au bon moment et comme une lecture "détente". Je lirai la suite si je mets la main dessus à la bibliothèque. Cela dit, on peut tout à fait s'en passer, c'est vrai.
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P
J'ai eu l’impression de lire des trucs que j’avais déjà lu cent fois...
L
Je ne l'ai pas trouvé aussi plat que ce que tu dis, ceci étant, ce n'est pas l'écriture du siècle, je suis d'accord, mais j'ai pris plaisir à renouer avec Douglas :)
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P
Comme je le dis dans mon billet, il a probablement souffert de passer après Paul Auster, dont le roman se déroule presqu'à la même époque et où il est déjà beaucoup question de famille et d'éducation.
U
D'une part il m'a l'air alambiqué, d'autre part j'ai lu cet auteur deux fois et je n'avais pas apprécié mes lectures. Je vais donc passer mon chemin.
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P
Tu ne manqueras rien :-)
M
Bien, plus aucun scrupule à ne pas être attirée par cet auteur !
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P
En tout cas ce roman-ci est tout à fait dispensable !
N
Je le savais bien qu'il ne fallait pas le lire après Paul Auster... comment veux-tu ? Ils ne jouent pas dans la même catégorie tous les deux :-)...
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P
Certes, mais je m'attendais quand même à quelque chose de plus original, je me suis ennuyée à mourir!
A
Et bien, je suis comme Aifelle... et ne pense pas commencer pas ce livre là !
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P
Il faut lire A la poursuite du bonheur ou L'homme qui voulait vivre sa vie.
A
Le croiras-tu, je n'ai jamais lu cet auteur ! J'en ai un dans ma PAL depuis longtemps, il faudrait que je le ressorte.
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P
Ses tous premiers valent le coup, ils sont très bons, mais depuis je trouve qu'il tombe dans la facilité.
K
Merci. En dépit de la sympathie forte que j'éprouve pour le francophone Kennedy, je vais passer, surtoutqu'il s'agit d'une trilogie
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P
C'est vrai qu'il a un côté sympa, mais c'est loin d'être suffisant. ...