Le mystère Henri Pick - David Foenkinos
"Je pourrais être un psychopathe. Après tout, j'ai été critique littéraire pendant quelques années."
Il m'arrive parfois de faire des trucs de dingue, comme de lire un roman de David Foenkinos. Il faut dire que je résiste difficilement à un roman qui parle de livres et de bibliothèques, et le héros de ce roman est précisément un roman.
A la pointe du Finistère, un bibliothécaire a eu l'idée (inspirée par Richard Brautigan) de créer une bibliothèque des livres refusés, tous ces manuscrits qui n'ont jamais trouvé d'éditeur pour les publier. Le projet, qui a fait grand bruit au début, a fini par tomber plus ou moins dans l'oubli. Une jeune éditrice parisienne, originaire du lieu et qui y passe ses vacances, décide d'aller jeter un œil sur ces livres oubliés. Bingo ! Elle met la mains sur un chef d'œuvre : Les dernières heures d'une histoire d'amour de Henri Pick. Qui est ce mystérieux auteur ? Le patron de la pizzeria locale, décédé deux ans plus tôt, et que sa femme n'a jamais vu écrire, ni même tenir un livre. Delphine obtient de son patron qu'il publie le livre. Tous les mystères autour de la découverte du manuscrit en font un best-seller immédiat. A tel point qu'un critique littéraire déchu décide d'aller enquêter sur place pour tenter de découvrir le fin mot de l'histoire.
"Lire est une excitation exclusivement égotique. On cherche inconsciemment ce qui nous parle."
Il faut se rendre à l'évidence : Foenkinos ne me parle pas, et j'ai eu bien du mal à arriver au bout de ce roman. Certes, l'idée de départ était plutôt maligne, mais le résultat est un roman totalement insipide. Ni la plume, ni l'histoire, ni aucun des personnages n'ont le moindre relief. Et comme l'intrigue est plutôt mince, l'auteur multiplie les histoires parallèles, histoires d'amour et de rupture qui semblent toutes sorties d'un roman photo de ma jeunesse, et où les sentiments qui s'expriment ont l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarettes. Certes, on nous y dévoile l'envers du petit monde de l'édition, et on y croise la moitié de la critique littéraire parisienne, mais tout ceci reste bien superficiel. Le roman est bourré de références littéraires, très doctement expliquées au lecteur (qui n'a jamais rien lu) et de notes de bas de page qui se veulent malicieuses et tombent souvent à plat. On ne peut certes pas reprocher à David Foenkinos de tabler sur l'intelligence de son lecteur. Même la pirouette finale est décevante : de nos jours, il ne faut plus écrire des histoires, il faut inventer des histoires pour faire vendre des livres. Le marketing prime sur le texte, et le commerce sur la littérature.
Gallimard, coll. Blanche, 2016. - 288 p.